L’extrait que nous vous présentons provient d’un numéro exceptionnel de Sois-Chic, le journal clandestin des E.I. Composé apparemment dans la seconde moitié du mois de mai 1944, ce numéro est le premier qui n’a pas été dirigé par Léo Cohn, dont on annonce en première page le départ vers Israël avec un groupe de 60 garçons (les rédacteurs du journal ne savent pas encore que Léo a été arrêté le 16 mai 1944 à Toulouse et qu’il n’arrivera jamais au bout de son voyage). Le journal est désormais dirigé par Jean-Paul Nathan, bras droit de Léo depuis plus d’un an dans la rédaction de Sois-Chic, et qui deviendra après la guerre un grand journaliste en France.
Deuxième point particulier, Sois-Chic, qui avait jusqu’à présent été pour l’essentiel l’expression des membres du chantier rural de Lautrec, y compris après la plongée dans la clandestinité en octobre 1943, devient le journal national du mouvement des E.I., d’où le choix du thème du numéro, qui aborde les questions concernant l’avenir de la société française. Nous sommes déjà dans l’atmosphère de la future libération.
Enfin, ce Sois-Chic est en réalité le dernier numéro de ce journal exceptionnel. Après le Débarquement du 6 juin 1944, comme beaucoup d’autres, Jean-Paul Nathan rejoint le maquis E.I. où il retrouve d’ailleurs ses trois frères. Le temps de l’action a sonné, et lorsque le mouvement recommence à fonctionner au grand jour, à l’automne 1944, ce n’est pas Sois-Chic qui renaîtra, mais les publications d’avant la guerre, L’E.I.F. et Lumière.
Dans ce numéro qui planche sur l’avenir, beaucoup d’articles auraient pu convenir à ce numéro « politique » de L’éclaireur. Il y a ainsi un excellent article de Denise Gamzon, dite « Pivert », sur le socialisme, mais qui était beaucoup trop long. L’article choisi, intitulé « questions sociales » est signé « M. », vraisemblablement le même signataire qu’un article du même numéro consacré « aux perspectives du mouvement » avec une analyse très intéressante d’un mouvement de jeunesse qui a su répondre « présent » aux défis du moment mais qui s’est également usé, handicapant ses possibilités de reprise future.
« M. » est Maurice Bernsohn, qui fera son alyah et sera l’un des fondateurs du kibboutz Névé Ilan (lire sa biographie sur le site du Judaïsme alsacien : http://judaisme.sdv.fr/perso/dirige/bernsohn/index.htm).
Dans notre article, Maurice lance la proposition d’une nouvelle rubrique, consacrée donc aux problèmes sociaux, et qui montre la très grande méfiance des mouvements de jeunesse vis-à-vis de la politique, opposée au besoin de la confrontation avec les réalités de la vie et des difficultés réelles des populations.
Publié le 28/11/2021