« Il appela Moïse et l'Éternel lui parla depuis la tente d'assignation en ces termes. » (Lévitique 1,1)
Raphaël. Ce verset est surprenant pour plusieurs raisons. L’ordre des mots est intrigant : pourquoi ne pas nommer Dieu, sujet du verbe « appela », d’entrée de jeu ?
Judith. Et d’ailleurs pourquoi est-ce que Dieu appelle Moïse avant de lui parler ? Pourquoi est-ce à lui qu’il s’adresse et pas à tout le peuple ? Et pourquoi dans cette tente et pas publiquement ?
Laura. On peut également se demander pourquoi on utilise l’expression « en ces termes » : on verra bien comment Dieu s’exprime par la suite, donc que nous apporte cette précision ?
Simon. On remarque aussi que la lettre alef du mot vayikra est anormalement petite. Et les commentateurs donnent différentes explications à cela.
Laura. On remarque tout d’abord que l’échange entre Dieu et Moïse se fait par la parole. L’apparition n’est pas visuelle. La parole, la voix, c’est quelque chose de presque immatériel et cela rappelle que Dieu reste toujours inaccessible et qu’il ne peut (ni ne doit) être représenté.
Judith. Je suis d’accord, mais ce verset témoigne toutefois d’une relation très particulière entre Dieu et Moïse. C’est pourquoi il l’appelle avant de lui parler. Rachi précise d’ailleurs que c’est une marque d’affection. Et si cet appel se fait au vu et au su de tout le peuple, c’est pour inviter chacun à se hisser au niveau de Moïse, qui a été capable de nouer une telle relation avec Dieu.
Simon. Je pense au contraire que ce verset nous apprend que n’est pas Moïse qui veut. C’est lui et personne d’autre que Dieu appelle. Pourquoi lui, d’ailleurs ? Selon les commentateurs, c’est parce qu’il est modeste, qu’il sait se faire petit. Ce dont témoignerait le petit alef. Le premier mot, vayikra, ce sont quatre grandes lettres (comme les quatre lettres du nom divin) et une petite : comme pour symboliser la rencontre de Dieu et d’un simple petit homme, modeste mais prêt à apprendre, puisque la lettre alefveut dire « apprendre », comme dans le mot oulpan (même étymologie).
Raphaël. On s’est demandé pourquoi le nom de Dieu n’apparaissait pas au début du verset, ce qui aurait été plus logique grammaticalement. Or c’est le nom de Moïse qui apparait en premier. Il me semble que plus Moïse est modeste, plus Dieu l’honore ! Moïse veut se faire tout petit, alors Dieu fait au contraire en sorte que son nom apparaisse avant le sien ! Dans tout ce verset, Dieu et son messager se font des politesses (« toi d’abord, non toi ! »), ce qui montre, comme le disait Judith, qu’il y a une relation particulière, très complice, entre eux.
Judith. Pour en revenir à l’expression « en ces termes », elle laisse entendre que Dieu demande à Moïse de ne rien changer de ce qu’il lui dira, d’être un messager fidèle qui ne doit rien modifier à la parole divine lorsqu’il la transmet au peuple.
Laura. Mais alors pourquoi Dieu ne parle-t-il pas directement à celui-ci ? C’est la même question que pour les Dix Commandements à propos desquels la Tora raconte que le peuple a demandé à Moïse d’être un intermédiaire pour ne pas entendre la voix divine directement, ce qui leur faisait peur. Ici aussi, Dieu passe par Moïse pour ne pas trop déstabiliser les Hébreux.
Simon. De façon un peu différente, on peut dire que Dieu ne s’adresse pas directement au peuple pour préserver son libre arbitre. Si la présence de Dieu est trop imposante, on n’a plus le choix ni de croire ni d’agir. Dieu ne s’impose pas aux hommes, il donne ses instructions en préservant une part de mystère, donc au sein de la tente et uniquement via Moïse, qui, lui, a une foi inébranlable.
Raphaël. La tente est en effet un lieu plus discret, mais c’est aussi ce qui accompagne les Hébreux dans le désert et qui témoigne de la présence divine. Dieu s’adresse à Moïse depuis la tente pour montrer qu’on peut toujours trouver des repères, même en plein désert.
Judith, 17 ans, lycéenne.
Laura, 17 ans, lycéenne.
Raphaël, 17 ans, lycéen.
Simon, 17 ans, lycéen.
Lévitique 1,1
וַיִּקְרָא אֶל מֹשֶׁה וַיְדַבֵּר יְהוָה אֵלָיו מֵאֹהֶל מוֹעֵד לֵאמֹר
RACHI
Il appela. À chaque parole, à chaque discours, à chaque commandement (adressé à Moïse par Dieu), il y eut d’abord un appel, ce qui dénote de l’affection […] Quand Dieu s’adressa aux prophètes des autres nations, en revanche, il le fit sans égard comme si c’était un événement accidentel, ainsi qu’il est dit : « Dieu survint (vayiker -ויקר) vers Balaam » (Nombres 23,4).
En ces termes (littéralement : « pour dire »). « Sors et dis-leur » (par ces mots, Dieu demande à Moïse de transmettre sa parole au peuple). Autre explication : « Pour me dire » : Dis-leur mes paroles et fais-moi savoir s’ils les acceptent.
MIDRASH Yalkout Chimoni
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« Il appela Moïse et l'Éternel lui parla depuis la tente d'assignation en ces termes. »
Rabbi Laura. L’échange entre Dieu et Moïse se fait par la parole (« il appela », « il parla »). L’apparition n’est pas visuelle. La parole, la voix, c’est quelque chose de presque immatériel et cela rappelle que Dieu reste toujours inaccessible et qu’il ne peut (ni ne doit) être représenté.
Par ailleurs, pourquoi Dieu ne parle-t-il pas directement au peuple ? C’est la même question que pour les Dix Commandements à propos desquels la Tora raconte que le peuple a demandé à Moïse d’être un intermédiaire pour ne pas entendre la voix divine directement, ce qui leur faisait peur. Dieu passe par Moïse pour ne pas trop déstabiliser les Hébreux.
Rabbi Judith. Ce verset témoigne d’une relation très particulière entre Dieu et Moïse. C’est pourquoi il l’appelle avant de lui parler. Rachi précise d’ailleurs que c’est une marque d’affection. Et si cet appel se fait au vu et au su de tout le peuple, c’est pour inviter chacun à se hisser au niveau de Moïse, qui a été capable de nouer une telle relation avec Dieu. L’expression « en ces termes » laisse entendre que Dieu demande à Moïse de ne rien modifier de ce qu’il lui dira, d’être un messager fidèle qui ne doit rien changer à la parole divine lorsqu’il la transmet au peuple.
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Rabbi Raphaël. Pourquoi le nom de Dieu n’apparaît pas au début du verset, ce qui aurait été plus logique grammaticalement ? C’est le nom de Moïse qui apparaît en premier. Il me semble que plus Moïse est modeste, plus Dieu l’honore ! Moïse veut se faire tout petit, alors Dieu fait en sorte que son nom apparaisse avant le sien ! Dans tout ce verset, Dieu et son messager se font des politesses (« toi d’abord, non toi ! »), ce qui montre qu’il y a une relation très complice entre eux.
Pourquoi évoquer la tente ? C’est ce qui accompagne les Hébreux dans le désert et qui témoigne de la présence divine. Dieu s’adresse à Moïse depuis la tente pour montrer qu’on peut toujours trouver des repères, même en plein désert. Rabbi Simon. Ce verset nous apprend que n’est pas Moïse qui veut. C’est lui et personne d’autre que Dieu appelle. Pourquoi lui ? Parce qu’il est modeste, qu’il sait se faire petit. Ce dont témoignerait le petit alef. Vayikra, ce sont quatre grandes lettres et une petite : comme pour symboliser la rencontre de Dieu et d’un simple petit homme, modeste mais prêt à apprendre (alef veut dire « apprendre »). Dieu ne s’adresse pas directement au peuple pour préserver son libre arbitre. Si la présence de Dieu est trop imposante, on n’a plus le choix ni de croire ni d’agir. |
BAAL HATOURIM
Il appela. Trop modeste pour se prévaloir de l’affection et de l’estime manifestées par Dieu à son égard, Moïse voulut écrire vayiker employé à propos de la parole divine à Balaam (voir Rachi). Mais Dieu lui ordonna d’écrire : vayikra. Moïse, gêné, réduisit toutefois la taille de la lettre alef (permettant la double lecture vayiker/vayikra).
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ZOHAR
Il appela. Le petit alef n’existe que pour cet appel, pas pour ceux qui ont eu lieu avant la faute du Veau d’or (l’appel du buisson ardent – Exode 3,4 – et celui du Sinaï – id. 19,3) car en dépit de sa solennité, l’appel n’avait plus la même majesté qu’avant cette faute.
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Une règle de vie (rabbin Jean Schwarz)
Il appela. Pourquoi l’Éternel appela Moïse avant de lui parler ? Tout simplement pour nous apprendre comment nous devons agir : ne jamais adresser la parole à quelqu’un avant d’avoir attiré son attention. Dans le même ordre d’idées, il est bien entendu qu’on n’a pas le droit de pénétrer dans l’appartement d’autrui sans s’annoncer. Il ne faut pas oublier que le savoir-vivre et la politesse ont, d’après la tradition, précédé le don de la Tora et ont priorité sur elle.
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MIDRASHIM
Il appela. Car Moïse n’osait pas rentrer avant d’avoir été appelé. C’est une preuve de savoir-vivre. On enseigne à ce sujet qu’un érudit qui n’a pas de savoir-vivre vaut moins qu’une charogne.
Il appela. Au moment où il lui dictait la Tora, Dieu avait donné à Moïse la quantité exacte d’encre pour tout écrire. Quand, dans son humilité, Moïse écrivit un alef plus petit, il économisa un peu d’encre à son insu. Une fois l’écriture terminée, c’est avec cette encre céleste non utilisée que Dieu illumina le visage de Moïse dont la Tora dit qu’il était rayonnant. |
Publié le 16/04/2021