L’opposition et la complémentarité du masculin et du féminin sont centrales dans la tradition juive : la différence des sexes étant féconde, il faut la maintenir. Elle n’est pas une simple construction historique ou culturelle. Le Talmud enseigne que les mots hébraïques « homme » (ich, איש) et « femme » (icha, אשה) contiennent chacun une lettre du nom divin (יה), la transcendance n’étant possible que dans le maintien des identités sexuelles distinctes. D’où les nombreuses règles bibliques visant à protéger la distinction sexuelle, comme l’interdit pour un homme de porter un vêtement de femme et vice-versa (Deutéronome 22,5).
Le discours et la pratique traditionnels sont souvent embarrassés s’agissant de l’homosexualité et la transidentité demeure globalement impensée, sauf à condamner sans réserve l’idée même d’un décalage entre sexe biologique et identité sexuelle, sociale ou vécue. Pourtant, le Talmud enseigne que l’Adam primitif était à la fois « homme et femme » et les sages, étudiant les cas d’êtres androgynes, reconnaissent que les frontières entre masculin et féminin ne sont pas si étanches. La kabbale, quant à elle, s’intéresse à l’androgynie divine pour nuancer le caractère rigide des identités psychosexuelles humaines. Il existerait des âmes (ou des étincelles d’âme) féminines résidant dans des corps d’hommes et inversement.
Par ailleurs, la différence des genres a souvent impliqué une impossibilité pour le « sexe faible » de prendre des responsabilités communautaires ou d’accéder à l’étude du corpus global des textes de la tradition, malgré des évolutions récentes très significatives.
Comment entendre aujourd’hui les enseignements traditionnels sur le masculin et le féminin ? Quel regard porter sur la notion de couple et plus largement sur la place de la famille ? Le judaïsme a-t-il des choses à dire quant à la théorie du genre ou l’intersexualité ? Les Juifs sont-ils suffisamment engagés contre l’homophobie et la transphobie ?
Publié le 07/12/2020